Soutenir les savoirs autochtones est la meilleure façon de lutter contre les changements climatiques

Le GITPA apporte son soutien au

Projet Éducatif “École Technique Jivaro -Wampis”

de la Fédération des communautés Wampis de la Rivière Santiago -
FECOHRSA (Federación de las comunidades Huambisas del rio Santiago).

Les Jivaro - Wampis (ou Huambisas en espagnol) sont un peuple autochtone d’Amazonie vivant en communautés le long des rivières Santiago et Morona au Nord du Pérou. Comme la plupart des peuples autochtones du pays, les Wampis se voient confrontés à des décisions politiques et économiques imposées par l’État central qui ne correspondent ni à leur culture ni à leur vision du développement. C’est le cas en termes de politiques éducatives. Actuellement, l’enseignement qui se voudrait « interculturel et bilingue » dans les classes de primaire et de secondaire ne se fonde très majoritairement que sur la transmission de savoirs produits par les sociétés d’origine européenne. Les programmes éducatifs imposés par l’État ne sont pas véritablement interculturels et ne permettent pas de faire vivre des cultures ancestrales comme la culture wampis.


L’objectif principal du projet École Technique Wampis est de sauvegarder et maintenir vivante la culture wampis, ses connaissances et ses techniques élaborées tout au long de son histoire.

Une culture vivante est une culture qui se transmet de générations en générations permettant aux plus jeunes de se la réapproprier et de la faire évoluer. Qui dit transmission, dit éducation.
Le projet École Technique Wampis, à travers la Fédération de défense des droits des communautés wampis FECOHRSA, veut implanter dans trois collèges du district de la rivière Santiago un programme d’enseignement des connaissances et techniques ancestrales wampis

Localisation des communautés Wampis
muun portant les accessoires ancestraux des hommes expérimentés: couronne de plumes
et lance

Ce programme s’articule autour d’ateliers pratiques dispensés aux élèves par des sages, « muun », hommes et femmes désignés et reconnus comme tels par les Wampis, qui possèdent une grande expérience et ont le désir de transmettre aux jeunes.
Après les cours de la matinée qui suivent le programme scolaire national, les élèves retrouveraient leur muun l’après-midi pour y recevoir un enseignement correspondant à l’un des 6 domaines qui constituent la base des activités quotidiennes et ancestrales wampis : la chasse et la pêche, l’horticulture, l’architecture, l’artisanat (céramique, tissage, etc.), la gastronomie et les pratiques rituelles (danses rituelles, utilisation des plantes, etc.). L’enseignement de ces 6 activités s’accompagnera de la transmission des mythes wampis et des chants magiques « anen ».
Les mythes relatent l’origine des savoirs techniques tandis que les chants sont essentiels pour les Wampis à l’accomplissement et la réussite des activités (par exemple un chant permet au chasseur d’attirer le giber). Au-delà des savoirs et savoir-faire enseignés, il s’agit donc de perpétuer et de valoriser une cosmologie et un rapport au monde propres à la culture wampis.


Un des sages recrutés pour le projet Ecole Technique Wampis en face de son métier à tisser.

Avant l’apparition des écoles sur le territoire, c’était les parents, les grands-parents, oncles ou tantes qui se chargeaient de l’éducation des enfants. La transmission se faisait alors moins par la parole que par l’observation et la pratique. C’est pourquoi le projet École Technique Wampis met l’accent sur la dimension pratique et technique des ateliers. Les sages feront sortir les élèves des salles de classe pour qu’ils aillent ensemble apprendre en observant, en expérimentant et en répétant les gestes de l’enseignant. On ne peut pas connaître où sont les bons coins à argile pour réaliser des céramiques si on n’a pas appris à les chercher. Il ne s’agit pas seulement d’assimiler des savoirs mais de les incorporer.
De la même manière, l’évaluation des enseignements sera pratique et prendra la forme de l’organisation dans les collèges d’une foire artisanale et gastronomique à la fin de l’année scolaire. Le travail fournit pendant l’année sera exposé lors de cet évènement, une manière de motiver les jeunes et de montrer à la population les bénéfices d’une maîtrise des connaissances et des techniques ancestrales.

 


Les élèves d’un des collèges où s’implantera le projet École Technique Wampis en position
pour éxécuter la danse rituelle du serpent « napi » lors de la fête de fin d’année.

Pendant que les sages wampis s’occuperont de leurs élèves, ils ne pourront pas s’atteler aux tâches nécessaires à la subsistance de leur famille. C’est pourquoi le projet École Technique Wampis se doit de trouver les ressources financières qui pourront combler ces manques et permettre aux sages de se consacrer pleinement à leur mission. Il faut aussi penser entre autres à la construction d’une salle en matériaux de la zone spécifiques aux ateliers, à l’achat de matériel et d’essence pour faciliter les trajets des sages. L’exécution du projet necessitera également des ressources liées à sa gestion. C’est pourquoi nous faisons appel aujourd’hui à de généreux contributeurs et mécènes qui pourront nous aider à lancer le projet pour la première année. Il s’agit de mettre en place le projet École Technique Wampis dans trois collèges et de recruter 4 sages par institutions, 2 femmes et 2 hommes soit un total de 12 muun.


Pour son impulsion la premère année, le projet École Technique Wampis necessiterait
une somme de 20. 000 euros
(matériel et salles pour les ateliers, rémunération des sages, essence pour les déplacement en bateau)


Une vue sur les salles de classe d’un des collèges concernés par le projet École Technique Wampis

D’autre part, en prévoyant des phases de communication et de socialisation du projet auprès des administrations districtales, régionales et centrales (réalisation d’un documentaire, diffusion des résultats par voie radiophonique, etc.), le projet École Technique Wampis voudrait inciter l’État péruvien à appuyer cette initiative du peuple wampis.

Ce projet, élaboré par la fédération wampis FECOHRSA, montre la volonté du peuple wampis de choisir lui-même ce qu’il souhaite enseigner à ses enfants.


Un droit qui est reconnu aux peuples autochtones dans la Convention 169 de l’Organisation Internationale du Travail que le Pérou a ratifié en 1994 et la Déclaration des Nations unies des droits des peuples autochtones approuvée par le Perou lors du vote en AG des Nations unies le 7 septembre 2007.
Le projet École Technique Wampis est un projet pilote s’inscrivant dans une volonté plus globale d’autodétermination du peuple wampis. Le peuple wampis veut faire reconnaitre par l’État péruvien le gouvernement autonome de la nation wampis gérant son territoire ancestral et l’administrant selon sa propre politique du « bien-vivre », tajimat pujut, de respect de la vie humaine et de la nature. Ce gouvernement, démocratiquement élu, attend une reconnaissance de la part de l’État.

Pueblo Wampis conforma primer gobierno autónomo indígena del Perú.

Le peuple Wampis, à travers la fédération FECOHRSA, veut transmettre les valeurs du tajimut pujut aux jeunes générations pour qu’elles continuent de défendre leur culture et leur environnement.

A l’heure où les politiques économiques d’extraction sans limite des ressources de la terre en sont venues à menacer la vie des peuples autochtones, des forêts, des animaux et des plantes avec lesquelles ils vivent, le projet École Technique Wampis veut donner une chance aux jeunes de se réapproprier les savoirs de leurs aieux. S’il est évident que les connaissances occidentales sont nécessaires pour survivre dans notre monde globalisé, il est vital de donner aux générations futures les possibilités de faire leurs propres choix de vie en fonction du milieu dans lequel ils vivent. Aujourd’hui, ce qu’on apprend aux jeunes dans les collèges wampis ne leur permet pas de vivre correctement dans leur communauté et en adéquation avec leur environnement. Le programme national ne répond pas à leur nécessité : pas de chasse, pas de pêche, pas d’horticulture, etc. Les pratiques propres à une culture ne sont pas qu’une affaire de patrimoine, ce sont aussi des manières d’habiter le monde. Par conséquent, une véritable éducation interculturelle devrait être celle qui offre des choix différents d’habiter le monde permettant par là d’en créer de nouveaux. Telle est l’ambition du projet École Technique Wampis.


Photo: Maxime Rivoire

Faire un don de 5,10,20 € ou plus
c'est possible sur le site de COLLÉO

Le correspondant du projet en France: paul.codjia@hotmail.fr

CODJIA, Paul :
après des études d’histoire et philosophie des sciences, il obtient un master d’ethnologie et anthropologie sociale à l’École des Hautes Études en Sciences Sociales en 2012. Il commence sa thèse la même année sous la direction d’Alexandre Surrallés au Laboratoire d’Anthropologie Sociale du Collège de France, et décide de travailler chez les Jivaro Wampis au Nord de l’Amazonie péruvienne. Il y mène des enquêtes de terrain depuis 2013 et travaille avec les fédérations autochtones locales sur les thématiques de défense des droits territoriaux et d’éducation interculturelle.