QUESTIONS AUTOCHTONES

"Demandes ethniques et politiques publiques en Amérique latine"
Christian Gros

Politiques et paradoxes de l'ethnicité, coll. Problèmes d'Amérique latine, N°48, printemps 2003, IEG, pp 11-29.

La décennie 90 a été, en Amérique latine, une décennie de réformes constitutionnelles. Suivant l’exemple précurseur du Nicaragua (1987), du Brésil (1988) et de la Colombie (1991), peu nombreux sont les pays qui n’ont pas transformé substantiellement ou complètement leur constitution pour se définir d’une manière totalement inédite comme formant des nations pluriculturelles et multiethniques. Durant cette même période, 10 pays de la région, sur les 14 qui le firent de par le monde, signèrent aussi la Convention 169 de l’OIT sur les Peuples indigènes et tribaux. Cette convention établit au niveau international les droits collectifs que les Etats doivent reconnaître aux peuples indigènes qui vivent sur leur territoire.

Ce révisionnisme constitutionnel a lieu dans un contexte bien particulier caractérisé par une accélération du processus de mondialisation et par une sortie des régimes autoritaires (phénomène connu en Amérique latine comme celui de la “ transition démocratique ”) et ne peut se comprendre en dehors de celui-ci. Une conjoncture qui se caractérise au niveau économique par l’adoption plus ou moins imposée d’un modèle néolibéral, au niveau politique par l’acceptation généralisée de la démocratie représentative et de ses règles comme unique option pour élire ses dirigeants, et, au niveau culturel, par l’affirmation de nouveaux mouvements identitaires ethniques  qui semblent vouloir s’opposer à un processus accéléré d’homogénéisation culturelle et questionnent fortement les fondements sur lesquels s’était construit  la nation en Amérique latine (1).

Remarquons, dès à présent, comment cette nouvelle conjoncture qui coïncide avec une croissance inédite des inégalités sociales et de la pauvreté devait poser aux gouvernements (et pose toujours) de difficiles problèmes de gouvernance et de légitimité. Comment gouverner avec un Etat plus faible et dans le cadre d’une économie ouverte et maintenir un niveau minimal de légitimité quand il se fait chaque jour plus évident que, avec le nouveau modèle de développement “ vers l’extérieur ”, la situation d’une grande partie de la population se dégrade fortement ? Que proposer pour lutter contre un processus de fragmentation sociale et de marginalisation économique qui affecte chaque jour davantage une société dont la cohésion est déjà faible ?

Les changements constitutionnels qui ont eu lieu durant cette décennie peuvent se lire comme une recherche de solutions institutionnelles aux différents et contradictoires impératifs du moment : réformer l’Etat, rénover la démocratie, ouvrir l’économie, obtenir un développement “ auto-soutenable ”, reconnaître et institutionnaliser la présence d’un acteur ethnique héritage d’une histoire bien particulière, et formuler un nouveau projet de nation qui soit cohérent avec cette nouvelle donne.

Cette combinaison de démocratie, multiculturalisme et néolibéralisme dans les réformes constitutionnelles est particulièrement évidente pour des pays comme la Bolivie, le Pérou, la Colombie ou le Mexique. Au Mexique, par exemple, pays qui a la population indienne la plus forte de la région (environ 10 millions d’individus), ce n’est pas un hasard, si la même année (1992) on réforme l’article 4 de la Constitution pour reconnaître formellement le caractère multiculturel de la nation et l’article 27 pour permettre la dissolution des terres collectives (ejidos) et mettre fin ainsi à une réforme agraire qui avait été un drapeau de la révolution.

Cela dit, un des points les plus controversés concernant la nouvelle donne multiculturelle sera la question de l’autonomie que l’on pourrait ou devrait reconnaître aux populations indigènes. Il met en évidence le caractère paradoxal de la situation actuelle. Jusqu’où peut-on aller dans cette autonomie au moment même où les Etats peuvent penser avoir, à dure peine, conclu le long et difficile travail de contrôle de leur territoire et alors que, sous les effets du processus de globalisation, ils se voient clairement questionnés “ depuis dehors” par les forces du marché, les flux financiers et culturels et une nouvelle et formidable dépendance technologique ? Comment avancer dans la reconnaissance d’autonomies locales ou régionales sans mettre en péril la cohésion sociale, la capacité agglutinante de l’Etat, l’indépendance et la souveraineté de la nation et la possibilité de continuer avec une politique “ macro ” de développement qui suppose une insertion toujours plus profonde dans le marché international ? Si “ autonomie ” signifie littéralement “ l’exercice de la liberté pour se gouverner sous ses propres lois ”, quelles en seront les limites ? Nous verrons, sans surprise, que la réponse est bien différente suivant qui répond : l’Etat avec les groupes culturellement et économiquement hégémoniques, ou les groupes et acteurs qui leurs sont subordonnés et réclament l’ “ exercice de cette liberté ”. Et, nous poserons comme hypothèse que la question de l’autonomie ne peut s’entendre en dehors de cette conjoncture bien particulière et seulement comme un projet qui serait posé par et pour les populations indigènes (même s’il est bien évident qu’il revêt un sens et un relief bien particuliers dans ce cas). Pour être plus précis, nous poserons que l’autonomie est un projet multidimentionnel qui, analysé du point de vue de l’Etat, doit être mis en relation avec ses différents impératifs de légitimité et de gouvernance et, analysé du côté des organisations indigènes, doit être relié à une volonté de voir se concrétiser un certain nombre de droits collectifs désormais plus ou moins reconnus dans le domaine constitutionnel (2). Dans le premier cas, elle peut se concevoir comme une forme de réorganisation politico-administrative favorable à l’exercice d’une démocratie plus directe – “démocratiser la démocratie“ – qui permettrait une véritable participation citoyenne et elle serait entendue comme faisant partie d’un projet local de développement auto-soutenable reconnaissant les droits culturels établis dans les textes constitutionnels. Dans le second, elle serait fortement liée à un projet politique contre-hégémonique qui suppose une réorganisation plus profonde de l’Etat.

On se proposera, dans les pages qui suivent, d’analyser avec plus de précisions les différents contenus que l’on prétend donner aux projets d’autonomie, suivant que l’on en traite depuis l’Etat et du Pouvoir ou depuis les communautés et leurs organisations. Mais, avant d’y procéder, il est nécessaire d’examiner les relations existantes entre autonomie et territoire, car il est bien difficile de penser à une autonomie pour les communautés ou peuples indigènes, hors l’espace géographique qui pourrait en être le support et l’exercice.

Territoire et autonomie

La reconnaissance de droits collectifs pour une communauté culturelle ou religieuse ne suppose pas nécessairement que la ou les communautés en question soient dûment territorialisées et, si c’est le cas, que ce territoire soit juridiquement reconnu. Mais, quand il s’agit d’une population indigène (ou tribale) qui fait précisément de la reconnaissance d’une territorialité un droit essentiel, c’est bien différent. Le territoire est alors pensé et revendiqué comme inséparable de la culture et base de sa reproduction et il se présente comme l’espace où devrait pouvoir s’exercer une éventuelle autonomie. C’est du moins la conclusion à laquelle sont arrivés les rédacteurs de la convention 169 de l’OIT, convention qui a été ratifiée par 10 pays de la région. Les articles 13 et 14 insistent en effet sur la nécessaire reconnaissance et la protection, par les Etats signataires, de la territorialité des peuples indigènes. Un territoire défini d’une manière fort ample comme : (article 13, 2) “la totalité de l'environnement des régions que les peuples intéressés occupent ou qu'ils utilisent d'une autre manière.“

Un examen de quelques-unes des constitutions récemment adoptées dans la région nous montrera comment ces droits territoriaux sont dorénavant incorporés dans le droit positif de certains pays et comment il est associé à d’autres droits collectifs concernant en particulier les ressources naturelles et la reconnaissance d’une autorité indigène au pouvoir renforcé.

Certes, on ne manquera pas d’objecter que ces grands principes ajoutés à ceux de la Convention 169 de l’OIT peuvent fort bien, sans une volonté active de l’Etat, rester lettre morte. Mais il se pourrait aussi qu’il en aille différemment. Car, quelle que soit la volonté de ceux qui gouvernent, les nouvelles constitutions incluent souvent des dispositifs permettant aux citoyens de faire appel aux magistrats quand ils estiment que leurs droits constitutionnels sont violés par l’Etat ou par des particuliers. J.-M. Blanquer (3) a noté avec justesse que dans les années 90 on s’orientait vers une “ société de droit ” qui voyait de plus en plus les citoyens se saisir de la loi pour en réclamer l’application effective et cela grâce, en particulier, à la mise en place de nouveaux mécanismes tels que l’action de tutelle (en Colombie) ou l’action d’amparo (en Equateur) (4), actions qui sont à la base d’une importante jurisprudence concernant la mise en œuvre des droits indigènes.

Par ailleurs, on ne peut ignorer les changements substantiels qui ont eu lieu en moins de trois décennies (et qui ont donc commencé avant même les réformes constitutionnelles) concernant la situation juridique des terres occupées par les peuples indigènes et cela dans des régions où ces derniers n’avaient jamais eu une territorialité reconnue. Nous pensons en particulier à ceux qui vivent dans les forêts tropicales humides de l’Amazonie ou du Pacifique colombien, à ceux qui se trouvent situés dans les forêts ou les savanes de l’Orénoque ou dans d’autres régions de même type. Si le Pérou du général Velasco Alvarado (1968-1975) a été le premier à reconnaître largement la territorialité des “ communautés natives ” vivant dans les basses terres de l’Oriente, au Brésil, suite à une politique commencée à l’époque militaire et accélérée depuis, nous avons une territorialité indigène reconnue de diverses manières sur plus de 100 millions d’hectares de forêts (soit plus de deux fois le territoire français) (5) et, en Colombie, les nouveaux resguardos indigènes couvrent plus de 27 millions d’hectares, le quart du pays (6). Et ces trois pays, pionniers en la matière, ne sont pas les seuls. L’Equateur, la Bolivie ou le Venezuela empruntent le même chemin (7). Certes, la reconnaissance de territoires collectifs ne signifie pas nécessairement l’établissement d’une certaine autonomie pour les populations concernées, mais incontestablement, elle en est un premier pas. Nous avons vu comment au niveau constitutionnel elle s’accompagne de droits spécifiques et d’institutions ad hoc concernant l’accès à la terre et à ses ressources et des formes locales d’auto gouvernement.  Nous reviendrons sur ces différents points, évidemment très importants du fait de l’extension des territoires concernés et de leurs ressources.

La situation des populations indiennes, plus nombreuses, qui vivent sur les hauts plateaux andins ou en Mésoamérique sous la forme de communautés paysannes est sensiblement différente. Bien qu’ayant un accès au sol reconnu depuis un temps beaucoup plus ancien, leurs terroirs ne correspondent pas nécessairement au concept juridique de territoire indigène avec les droits particuliers qui lui sont attachés. Mais la communauté indienne paysanne forme souvent, ici, la base de l’organisation politico-administrative des campagnes (au niveau municipal ou infra municipal) et jouit donc d’une certaine reconnaissance publique. L’espace manque pour rendre compte des diverses modalités pouvant être données à cette reconnaissance d’une assise territoriale et cela d’autant plus qu’il conviendrait de considérer l’évolution récente qui, avec la mise en œuvre des politiques de décentralisation et de ”remunicipalisation”, vient réorganiser les campagnes. Disons simplement que de jure ou de facto nous sommes en présence de groupes qui se caractérisent par leur projection territoriale et peuvent de ce fait disposer ou réclamer une forme particulière d’autonomie dans la gestion de leur espace et de leurs formes d’organisation.

Les demandes d’autonomies vues depuis les organisations indigènes

Maintenir un certain niveau d’autonomie a toujours été une préoccupation des communautés indigènes ou paysannes. Cette autonomie fut reconnue et organisée par le pouvoir colonial en échange de la conversion religieuse, de la loyauté politique et du paiement d'un tribut et s'accompagna alors de droits territoriaux. Elle s’est prolongée volens nolens, après l’indépendance, en dépit des changements importants introduits dans l’organisation sociale et économique des campagnes par l’Etat et le marché. Aujourd’hui encore, on peut considérer que beaucoup des communautés indigènes et paysannes se maintiennent comme des espaces sociaux et économiques caractérisés par ce que H. Mendras et E. Wolf (8) appellent une “ autonomie relative ”. On ne peut développer ce point comme il le mériterait, mais on ne peut sous-estimer le fait que, à la fin du XX° siècle et aujourd’hui encore, une part non négligeable de la population rurale vit toujours suivant un modèle communautaire caractérisé par une forme particulière de solidarité, d’affiliation (ce que R. Castel appelle des sociétés “cadastrées“), liant entre elles des familles se reconnaissant comme membre d’un même “ corps ”. Et, on ne doit pas oublier que cette forme particulière de communalisation n’est pas exclusive, bien au contraire, de formes spécifiques d’articulation à l’Etat et à la société nationale. Il s’agit en fait d’un monde rural et indigène où l’autonomie relative va généralement de pair avec des formes sui generis de subordination face à l’Etat et à la société dominante (9). Cela dit, on ne peut nier non plus que nombre de ses communautés se trouvent aujourd’hui en crise, jouissant d’une autonomie chaque jour plus “relative“ ou illusoire et incapables de répondre aux nécessités les plus élémentaires de leurs habitants.

Ces observations faites, considérons comment le thème de l’autonomie a été repris et politisé par les organisations indigènes qui, depuis leur apparition à la fin du XX° siècle, en ont fait un élément essentiel de leur plate-forme revendicative. Et, remarquons d’abord que cette revendication commune ne signifie pas un accord sur le projet lui-même. De fait, le débat sur le contenu et l’ampleur de ce projet se donne d’abord au sein du mouvement indigène lui-même et il est vif. On peut cependant identifier certains éléments qui, dans leur généralité, semblent faire l’objet d’un certain consensus. Les accords de San Andrès Larainzar, au Mexique, peuvent servir d’exemple. Signés en 1996 après de longues négociations menées au sein de la COCOPA (Commission de conciliation et pacification) entre des représentants du gouvernement, des experts, des anthropologues et des représentants des différentes composantes du mouvement indigène pro-zapatiste, ils en dessinent les principaux contours.  L’autonomie y est définie d’une manière très générale (article 4) comme : pouvoir décider des formes internes d’organisation sociale (politique, économique et culturelle) ; appliquer les systèmes normatifs internes ; élire leur “ auto-gouvernement ” ; fortifier la participation et la représentation politique ; accéder de manière collective à l’usage et aux fruits des ressources naturelles des terres et territoires ; préserver et enrichir les langues, les cultures et les identités ; pouvoir acquérir et utiliser des moyens de communications. Ce qui n’est pas très éloigné du préambule de la Convention 169 (ratifiée par le Mexique) qui prend  acte “de l'aspiration des peuples en question à avoir le contrôle de leurs institutions, de leurs modes de vie et de leur développement économique propres et à conserver et développer leur identité, leur langue et leur religion dans le cadre des Etats où ils vivent.“

Les deux versants de l’autonomie

 Evidemment, chacun des points avancés dans cet accord qui nous a servi d’exemple serait en mesure d’alimenter un long débat, les principes défendus revêtant des significations bien différentes suivant qui les évoque et prétend les mettre en œuvre. Pour faire court, disons que deux projets d’autonomie indigène, d’ampleur bien différente, sont en concurrence.

Le premier réclame la reconnaissance et l’institutionnalisation des différentes formes d’organisations sociales, économiques et politiques encore en vigueur au sein des communautés indigènes. La reconnaissance d’une autonomie signifierait en finir avec l’hypocrisie, le stigmate ou le rejet caractéristiques de la situation présente et reconnaître pleinement aux communautés indigènes le droit au maintien de leurs formes locales de gouvernement, une acceptation de leurs systèmes normatifs et d’organisation communautaire. Il demande donc que l’autonomie “relative“ qui de facto est une caractéristique centrale de la communauté agraire “corporée“ (tout particulièrement quand il s’agit de communautés indigènes) soit inscrite dans le droit positif et protégée. Ce qui suppose, dans le même mouvement, que ces communautés fassent l’objet d’une reconnaissance explicite comme base et sujet de ce droit et que leur territorialité soit aussi bien établie. Disons le, cette demande n’a rien d’utopique et plusieurs pays se sont avancés dans cette voie. Donnons deux exemples. Dans l’Etat d’Oaxaca, au Mexique, Etat qui a la plus forte concentration de population indienne de tout le pays, la Constitution autorise et de ce fait institutionnalise une possible élection des gouvernements municipaux suivant les “ us et coutumes ”. Elle reconnaît la présence de systèmes normatifs alternatifs et toute une série de droits collectifs pour les populations indigènes. Et l’on n’est pas dans la pure rhétorique puisque, en application de ce système d’autonomie, une grande majorité des municipes (412 sur 570 aux élections de 1998) (10) ont choisi d’élire leurs autorités par “ us et coutumes ” et hors du système des partis. En Colombie, la quasi totalité de la population indienne vit désormais dans le cadre de resguardos. Cela signifie que les communautés indigènes disposent de territoires bien établis, ont une personnalité juridique reconnue, peuvent élire librement leurs autorités coutumières qui font désormais partie de l’organisation politico-administrative du pays (art. 14 du décret 1397 de 1966), reçoivent dans le cadre de la décentralisation des transferts du budget public (transferencias) (loi 60 de 1993) et peuvent décider de leur programme de développement (11). On se souviendra que les territoires en question couvrent plus du quart du territoire national…

Le second projet suppose une réorganisation plus profonde de l’Etat et questionne fortement l’idée que l’on pouvait se faire de la nation. Il réclame la création d’entités politico-administratives qui pourraient revêtir la forme de régions ou de provinces indigènes autonomes. L’autonomie revendiquée se présente comme l’application du droit à l’autodétermination inhérent au statut de peuples indigènes, premiers habitants de la région. Or, parler en termes de peuple ou de groupe ethnique est toujours problématique. Contrairement aux communautés indiennes et paysannes, les groupes ethniques sont des communautés “ imaginées ”, de construction généralement récente, inachevée. Leurs contours sont souvent mal définis et n’ont pas reçu jusqu’à présent de reconnaissance institutionnelle. C’est donc faire référence à un autre niveau de communalisation et à un nouveau sujet de droit, pan communautaire, qui existerait au-delà des communautés locales (“corporées“) ou du municipe et qui peut inclure des populations aussi bien rurales qu’urbaines. Ajoutons que ces régions, par leur étendue, peuvent fort bien être non seulement pluri-communautaire (dans le sens qu’elles viendraient inclure un nombre non défini de communautés agraires “ corporées ”), mais pluriethniques. En effet, si l’on met de côté, et ce n’est pas rien, les territoires reconnus aux populations indiennes non paysannes vivant dans les basses terres (Amazonie et ailleurs)– qui sont souvent de type mono ethnique – il est fort probable que dans ces nouvelles entités territoriales autonomes vont devoir coexister différents groupes, indigènes et non indigènes. Un tel projet, défendu par de nombreux intellectuels organiques du mouvement indigènes au Mexique, en Equateur, en Bolivie, propose donc de créer de nouvelles frontières (administratives, politiques, culturelles) au sein du territoire national (12). On comprendra qu’il est plus difficile à mettre en œuvre que le précédent et qu’il est plus conflictuel. Aussi, on ne s’étonnera pas de le voir fortement rejeté par ceux qui le voient comme une tentative pernicieuse de fracturer le pays, de défaire la déjà problématique unité nationale et pis encore comme un premier pas en direction de demandes séparatistes. Il existe pourtant au moins deux antécédents historiques, au Panama et au Nicaragua dans lesquels l’autonomie reconnue ne se trouve pas être à la base d’un conflit persistant mais se présente au contraire comme sa résolution.

Au Panama (13), suite aux révoltes de 1925 et de 1930 motivées par une pression accrue des intérêts étrangers sur leur territoire et ses ressources, les indiens Kuna obtiendront le statut de réserve puis celui de comarca pour la région de San Blas (235 700 Ha) situé sur la côte Atlantique. Ce statut sera confirmé à diverses reprises et débouchera sur la loi 16 du 19 février 1953 considérée par les Kuna comme leur constitution politique garante de leur autonomie. Les terres et les ressources de Kuna Yala (nom vernaculaire donné à la comarca de San Blas) sont protégées et le Congrès général Kuna, qui est l’autorité supérieure des différentes communautés Kuna vivant sur place, est reconnu. Par la suite, la constitution de 1972 organisera la participation de représentants indiens avec droit de vote au Congrès de la république. A noter que les autres populations indiennes du Darien panaméen (Embera et Wounan) disposent, aujourd’hui, de leur propre comarca.

Au Nicaragua (14), ce seront les sandinistes qui proposeront un statut d’autonomie pour la côte Atlantique (loi 28 de 1987) mettant fin ainsi à une révolte des indiens Miskito alliés de la Contra, révolte qui menaçait le régime. Un soulèvement motivé par la volonté jacobine du gouvernement de faire entrer l’Etat révolutionnaire et de contrôler les ressources au sein d’une région qui, pour des raisons historiques, avait jusque-là bénéficiée d’une autonomie de fait. Cette autonomie, qui concerne toute la côte Atlantique (près de 50% du territoire national, prend, ici, un caractère bien particulier du fait de la composition pluriethnique de la population (Miskito, Sumu, Rama, Garífuna, Criollo, Métis, etc.). Ce statut sera promulgué en application d’une nouvelle constitution qui, la même année, reconnaît, pour la première fois en Amérique latine, le caractère multiethnique de la nation et un régime d’autonomie régionale (article 89, 180 et 181). L’autonomie est associée à une reconnaissance de droits collectifs en matière de langue, d’éducation, de contrôle du territoire et de ses ressources, et prévoit une forme particulière d’organisation politique et administrative, etc. En dépit d’une mise en œuvre assez laborieuse, ce statut d’autonomie est devenu un référent important pour les partisans d’une autonomie régionale au Mexique (en particulier pour l’ANIPA (15)).

L’Etat face au projet indigène

Notre hypothèse est que l’Etat, avec son projet néolibéral et son impératif démocratique, peut être intéressé en Amérique latine par la première variante du projet d’autonomie, une autonomie que l’on qualifiera de “light “ …pour autant que c’est lui qui en fin de compte viendrait en définir les modalités et son ampleur ; mais qu’il est beaucoup plus difficile de le voir négocier dans un futur proche une autonomie que l’on qualifiera de “hard“ et qui impliquerait la constitution de régions autonomes, même si la normativité en vigueur dans certains pays n’exclut pas cette possibilité.

Pour comprendre sa réceptivité au premier projet, il nous faut laisser provisoirement les autonomies indigènes et considérer l’importance accordée aux politiques de décentralisation et de démocratie participative. On verra ensuite, comment l’Etat peut considérer une certaine forme d’autonomie comme une modalité particulière de son projet décentralisateur.

Les politiques de décentralisation promues par les organisations internationales depuis une quinzaine d’années et mises en œuvre dans la plupart des pays de la région se présentent comme la réponse neolibérale à la crise de l’Etat bureaucratique et autoritaire hérité de l’époque national-populiste, un Etat considéré peu démocratique, inefficace et corrompu et de ce fait incapable d’apporter le développement et la démocratie à la base. Elles misent explicitement sur l’initiative et la capacité d’organisation de la société. Elles proposent une démocratie plus effective et participative, les autorités élues au niveau local ou régional devant, sous le contrôle direct des citoyens, de la société civile, prendre  en charge en toute autonomie un ensemble de fonctions (éducation, culture, santé, programmes de développement, etc.) autrefois du domaine réservé de l’Etat central.

On peut, quant à nous, considérer aussi la décentralisation comme une forme de gouvernement indirect, d’intervention de basse intensité, destinée à restaurer à bas coût un certain niveau de gouvernance et de légitimité dans une situation marquée par la contradiction existante entre un processus d’inclusion politique (comme résultat de la transition démocratique) et d’exclusion économique (comme produit de l’ouverture néolibérale). Une politique qui est cruciale dans la situation actuelle. En donnant aux populations locales quelques nouveaux moyens et l’illusion de partager véritablement le pouvoir, elle devrait permettre à l’Etat de se concentrer sur les défis stratégiques (selon l’expression de Castells (16)) liés à l’ouverture économique et à la mondialisation. Mais, si la décentralisation associée à des formes de démocratie participative peut être entendue comme l’introduction d’une autonomie relative pensée et organisée depuis l’Etat et devant assurer une nouvelle “gouvernance“, quel est son degré d’acceptation à la base, au sein des municipes ? Les nombreuses études (17) faites en ce domaine confirment généralement un fort degré d’acceptation. La décentralisation serait bien entrée dans les mœurs et la “ politique au village ” s’en trouverait enrichie et transformée.  Les populations concernées, et c’était l’objectif recherché, y trouveraient une nouvelle forme d’articulation à l’Etat qui, tout en respectant d’avantage leur autonomie, leur permettrait d’accéder directement à de nouvelles ressources. Les “acteurs“ semblent donc globalement favorables à ce transfert de responsabilités et de pouvoirs en direction de la communauté (ce que les experts de la Banque Mondiale appellent un processus d’ “empowerment“).

Or, si cette politique concerne tous les municipes ou autres espaces locaux, indifféremment de leur composition ethnique, elle revêt une signification bien particulière pour les populations indigènes dans les régions où ces dernières ont une présence majoritaire. Elle signale alors la communauté (indigène) comme une forme légitime d’organisation sociale, à même de se voir confier une série de nouvelles prérogatives et de manier elle-même (c’est-à-dire d’une manière autonome) des ressources et des programmes locaux de développement. D’une certaine manière elle se présente comme un pas effectif en direction d’une reconnaissance de leur autonomie locale “ relative ”.

Mais l’Etat peut, en application de cette même philosophie participative et décentralisatrice, prendre en compte les différences culturelles qui sont particulièrement visibles au niveau de la base. Si on laisse provisoirement de côté le débat normatif autour du multiculturalisme et de sa mise en œuvre – débat qui traverse l’Etat lui-même – pour adopter  une position plus pragmatique, la vérité est qu’il n’en coûte guère plus aux Etats qui ont déjà fait le premier pas en reconnaissant de jure leur composition multiethnique et pluriculturelle, d’adapter leur projet décentralisateur au cas particulier des communautés indigènes. Et c’est bien ce que semblent faire ceux qui désormais combinent leur néo-indigénisme avec la décentralisation. Le transfert de ressources et de compétences en direction du “ local ”, s’accompagne alors d’une reconnaissance des formes particulières d’organisation politique et sociale et d’un ensemble de droits collectifs. C’est ainsi que le projet décentralisateur trouve dans le champ culturel et dans les demandes politiques des arguments favorables à la reconnaissance d’une autonomie “ light ”. Mais, s’il s’agit bien de concéder une autonomie relative, Il se pourrait bien, que, ironiquement, le projet de l’Etat (et des classes dominantes) soit comme on l’a vu de reconstruire son hégémonie et de trouver une forme neuve et consensuelle de favoriser sa pénétration au sein de communautés qui, pour certaines d’entre elles, s’étaient maintenues jusque-là éloignées de son intervention directe et avaient fonctionné, de fait, d’une manière quasi “ autonome ”. Pas étonnant, alors, si la générosité intéressée de l’Etat rencontre vite ses limites, particulièrement quand il s’agit de réguler l’accès aux ressources naturelles existantes au sein des territoires indigènes déclarés “ autonomes ”. Bien qu’une demande insistante des communautés en soit précisément le contrôle, il s’agit de ces enjeux stratégiques sur lesquels l’Etat est peu enclin à faire des concessions…

Il n’en demeure pas moins que les nouvelles politiques indigénistes, avec toutes leurs limitations et ambiguïtés, se présentent en cohérence avec un processus de décentralisation qui a pour finalité une réorganisation politique et administrative permettant à un moindre coût un contrôle à distance du territoire national et de ses habitants et qu’elles rencontrent sur le terrain certaines des demandes en provenance des communautés indigènes. C’est cette “rencontre“ que les constitutions de la Bolivie, de l’Equateur, de la Colombie ou de l’Etat de Oaxaca au Mexique, organisent à leur manière, quand elles définissent explicitement la paroisse, le resguardo ou le municipe comme formant des entités territoriales décentralisées et autonomes.

L’autre visage de l’autonomie

Evidemment, il est beaucoup plus difficile, pour l’Etat, d’envisager une autonomie qui aille plus loin que le local, ou qui pourrait déboucher sur un nouveau découpage, toujours conflictuel, des municipes pour en faire des entités socialement et  culturellement plus homogènes (ce qui est une demande souvent formulée par ceux qui considèrent que les frontières municipales ont été dessinées pour précisément diviser les espaces indigènes) ; ou, mieux encore, qui permette la création de régions autonomes.  Une chose est de reconnaître les pratiques culturelles en vigueur dans les communautés indigènes – pour autant qu’elles ne vont pas à l’encontre des droits constitutionnels jugés fondamentaux – et une autre est d’accepter que des peuples et des régions disposent de leurs formes d’auto-gouvernement et … réclament un contrôle direct sur les ressources de leurs territoires. Ce n’est pas un hasard si en Colombie et en Equateur, deux pays considérés comme pionniers en matière de droits collectifs, il n’a pas encore été possible d’établir les entités ou circonscriptions territoriales indigènes prévues dans les constitutions, entités qui, de fait, seraient l’amorce d’une autonomie de type “hard“ ; et si, au Mexique, le Congrès, s’est empressé d’édulcorer les accords de San Andrès quand, sous l’actuel gouvernement, ils furent présentés comme base d’une réforme constitutionnelle.

Sans doute, cette résistance face à la création de régions autonomes peut s’expliquer par la volonté de maintenir un strict contrôle sur le territoire et ses ressources (terre, eau, biodiversité, richesses du sol et du sous-sol renouvelables et non renouvelables) et aussi par la peur, légitime, de créer de nouvelles frontières internes qui pourraient affaiblir encore la fragile unité nationale. Mais, il y a aussi les doutes sérieux sur l’organisation et le fonctionnement de régions qui, dans leur grande majorité, seraient de composition multiethnique et pan-communautaire. Le danger n’est-il pas de les voir déboucher sur de forts conflits intracommunautaires ou sur la domination d’un groupe ethnique localement en position hégémonique qui ne voudrait pas respecter …l’autonomie des autres. Les conflits ne sont pas une fatalité dans les régions indigènes, mais ils sont fréquents et parfois violents.  Miguel Bartolomé (18) prenant le cas de l’Isthme de Tehuantepec (dans le sud du Mexique), région parfois signalée comme propice a un statut d’autonomie, du fait de la présence massive et bien localisée d’une population indigène, nous alerte sur la possibilité de voir les Zapotèques s’en saisir pour assurer leur emprise sur les autres composantes ethniques de la région (Huave, Mixe, Totonaque, Mixtèque, etc.). Et, en Equateur, où la réforme municipale et de la paroisse a déjà été mise à profit avec succès par un mouvement indigène qui a su occuper ces nouveaux espaces de pouvoir, les organisations indigènes sont loin de partager une vision commune face aux futures CTI prévues par la constitution de 1998.  Certaines les verraient comme devant former la base politique et territoriale correspondant à chaque “ peuple ” ou “ nation ” - ce qui supposerait la constitution de régions aux frontières bien définies et culturellement homogènes comme on peut en rencontrer dans le cas des basses terres amazoniennes, mais beaucoup plus difficilement sur la cordillère – , alors que d’autres les conçoivent au contraire comme devant être le lieu où le pluri-culturalisme de la population devrait être assumé comme un principe central de son organisation autonome (19).

Quoi qu’il en soit, il est clair que ce versant de l’autonomie est loin de faire l’unanimité et que sa légitimité au sein de l’Etat et des classes dominantes est particulièrement faible. On pense, notamment, qu’il ne peut qu’aggraver ces problèmes de “ gouvernance ” contre lesquels on voudrait lutter, et c’est rédhibitoire. C’est pourquoi, certains, au sein du mouvement indigène, sans renoncer à la possibilité d’organiser à terme une autonomie supra-communautaire, sont favorables à une voie plus pragmatique (20). Pour eux, toute reconnaissance d’une autonomie à un niveau régional devrait être conditionnée à des accords locaux passés entre des entités autonomes (de type “light“) qui choisiraient librement de se fédérer pour former des unions (mancomunidades) ou fédérations trouvant leur cohésion dans un projet commun. Une voie difficile, semée d’obstacles et qui nécessite une forte volonté politique, tant des communautés en question que de l’Etat, mais qui est ouverte par différentes législations et se trouve expérimentée dans différents pays. En Colombie, par exemple, la figure du cabildo mayor qui est une autorité indigène venant regrouper un ensemble de communautés dotées de leur propre gouvernement anticipe en quelque sorte sur ce qui pourrait être mis en place dans le cadre des futures entités territoriales indigènes (ETI) prévues par la Constitution.

Le point de vue des communautés

Disons le, ce débat entre partisans d’une autonomie “hard “ et partisans d’une autonomie “ light ” se développe en grande partie en dehors des intéressés qui semblent plus préoccupés de résoudre au jour le jour leurs difficiles problèmes de survie. Ce qui ne signifie pas que les communautés indigènes et paysannes restent indifférentes aux menaces qui pèsent sur leurs ressources, qu’elles ne revendiquent pas un meilleur contrôle de leurs territoires (comme espace de reproduction social, économique et culturel), ou qu’elles ne soient pas intéressées par une reconnaissance de leurs formes particulières d’auto-gouvernement. Mais, il semble bien que, sauf exception, les populations indiennes ne donnent pas à ces demandes la forme explicite d’un projet politique d’autonomie local ou régional. De fait, les mêmes qui peuvent défendre à leur manière un plus grand contrôle sur leurs ressources ou la reconnaissance de leurs formes d’organisations “ traditionnelles ” n’hésitent pas à réclamer une  plus forte intervention de l’Etat : un Etat protecteur que l’on veut en même temps plus loin et plus présent, respectueux des autonomies locales et dispensateur de ressources et de services.

Cette situation, en apparence paradoxale, mérite quelques commentaires.

Cependant le modèle de l’Etat-nation souverain et homogène qui fait partie de l’habitus des Latino-américains ne correspond plus aujourd’hui aux réalités économiques, sociales et politiques du moment, tant pour des raisons internes que du fait de la globalisation en cours. Un nouveau paradigme se met en place. Les constitutions des années 90 donnèrent l’exemple d’une première tentative de réorganisation juridique et politique pour tenter d’adapter les institutions à cette nouvelle donne. Leurs ambiguïtés et inconsistances reflètent les perplexités de l’époque et le désir de concilier des intérêts différents. Les interrogations d’aujourd’hui ne sont pas moindres. Mais on peut être certain que la question posée - quelle type d’autonomie peut-on et doit-on concéder aux populations indigènes qui en font la demande ?-, ne va pas disparaître. Parce que ne vont pas disparaître ceux qui désormais la posent et les conditions qui ont présidé à cette énonciation. Et parce qu’il est d’un intérêt commun de définir un nouveau contrat social qui permette à tous de vivre sous un même toit, sous une même loi, sans nier pour autant le poids de l’histoire et la force renouvelée des identités culturelles.


(1) Gros C.,  2000, “Identité ou métissage : la nation en question”, Hérodote, n° 99, 4° trim., pp. 106-136

(2)Cf. notre analyse in : C. Gros, "Indigenismo y etnicidad : el desafio neoliberal", Antropología en la modernidad, M.V. Uribe, E. Restrepo (Ed.), Instituto Colombiano de Antropología, Bogotá, 1997.

(3) J.-M Blanquer. “Les institutions à l’épreuve de la pratique”, in C. Gros C., J.-M. Blanquer (Ed.), La Colombie à l’aube du troisième millénaire, Editions de l’IHEAL, Paris, 1996, pp. 87-106.

(4) M. J Cepeda, “La acción de tutela, arma del ciudadano contra la arbitrariedad”, in J.-M. Blanquer, C. Gros (Ed.), Op. cité, pp. 143-160. S. Hueber, Les droits collectifs des “Nationalités et Peuples  Indigènes“ d’Equateur : de la reconnaissance constitutionnelle à une mise en œuvre effective , Mémoire de DEA, IHEAL, Paris, 2002.

(5) J.P. Oliveira Filho, “Muita terra para pouco Indios ? Uma introdução (critica) ão indigenismo e à atualizacão do preconceito”, in A tematíca Indiígena na escola, A.L. da Silva, L.D. Benzi Grupioni (Eds.), MEC-Mari-UNECO, Brasilia, 1995, pp. 61-81.

(6) Le resguardo, institution d’origine coloniale, reconnaît un territoire collectif inaliénable appartenant aux membres d’une communauté ou “ parcialidad ” indigène.

(7) Pour l’Equateur, la Bolivie, le Pérou et le Chili, on pourra consulter : C. Gros, M-E Muñoz, Compilation of Current Legislation on Indigenous Issues in Latin America, Draft Report, (TC-99 – 01 –007–RG), Indigenous Peoples and Community Development Unit, Inter-American Bank, Washington, 2000, ( 298 p.). Et aussi : J. Marinissen, Legislación Boliviana y Pueblos Indígenas. Inventario y Análisis en la perspectiva de las demandas indígenas, SNV-CEJIS, la Paz, Sta. Cruz, 1998 ; V. Pessoa, “Procesos indígenas de participación política ciudadania en los espacios de gobierno municipal”, in V. Alta, D. Itturalde, M.A. López-Bassols, (Ed.), Pueblos indígenas y Estado en América-latina, Ed. Abya-Yala, Quito, 1998 ; R. Orellana., “Municipalización de pueblos indígenas en Bolivia: impactos y perspectivas”, in W. Assies , G. Van der Haar, A.  Hoekema, (Ed.), El reto de la Diversidad, El Colegio de Michoacán, Michoacán, 1999, pp. 315- 340.

(8) H. Mendras, Y. Tavernier, Terre, Paysan et Politique, Sedeis, 1969.  E. Wolf, Peasants, Prentice-Hall, Englewood  Cliffs, 1977.
           

(9) Un bon exemple de cette subordination est donnée par J. Rus, “La comunidad revolucionaria institucional: la subversión del gobierno indígena en los Altos de Chiapas, 1936-1968”, in G. Joseph y D. Nugent (Ed.), Everyday Forms of State Formation: Revolution and the Negotiation of Rule in Modern Mexico, Duke University Press, 1994.

(10)Cf. D. Recondo, Etat et coutumes électorales dans l’Oaxaca (Mexique). Réflexions sur les enjeux politiques du multiculturalisme, thèse pour le doctorat en science politique, Université de Bordeaux IV, 2002.

(11)Cf. C. Gros “Un ajustement à visage Indien ?”, in J.-M. Blanquer, C. Gros, op. cité, pp. 249-278.

(12) La littérature concernant ce débat est abondante. On pourra consulter M. Bartolomé, A. Barabas (Coord.), Autonomías étnicas y estados nacionales, CONACULTA-INAH, Mexico, 1998 ; G. García Colorado, I. Sandoval (Coord.), Autonomías y derechos de los pueblos indios, Instituto de Investigaciones Legislativas, México, 2000 ; H. D. Polánco, Autonomía regional. La autodeterminación de los pueblos indios, Siglo XXI, México, 1996.

(13) Pour le Panama, cf. J. Howe, “La lucha por la tierra en la costa de San Blás (Panamá), 1900-1930”, Mesoamérica, n° 29, 1995, pp. 57-76 ; P. Herlihy, “La revolución silenciosa de Panamá: las tierras de comarca y los derechos indígenas”, Mesoamérica, n° 29 1995, pp. 77-93 ; J.P. Archibold, “Autonomía Kuna y Estado Panameño, in M. Bartolomé, A. Barabas, op. cité, pp. 243-274.

(14) Cf. C. Gros, Y. Le Bot, Moskitia : La question de l’autonomie de la côte Atlantique du Nicaragua, Document de travail de l’ERSIPAL, n° 42-43, CREDAL, Paris, 1988 ; C. Hale, “Entre la militancia indígena y la conciencia multiétnica. los desafios de la autonomia en la Costa Atlantica de Nicaragua”, in S. Varese, Pueblos indios, soberania y globalismo, Abya-Yala, Quito,1996, pp. 127-156 ; M. Ortega  Hegg, “El regimen de autonomía en Nicaragua: contradicciones  históricas y debates recientes”, Alteridades, n°14, 1997,            pp. 99-105. 

(15) ANIPA : Assemblée nationale indigène pour l’autonomie, créée après le soulèvement zapatiste de 1994.

(16) M. Castells, La era de la información. Vol. II,  El poder de la identidad, Siglo XXI, 1997.

(17)“ Décentralisation : entre dynamiques locales et mondialisations ”, Cahiers du GEMDEV, (numéro spécial), n° 27, Octobre 2001. H. Rivière D’Arc, M.F Schappira, (Ed.), Les territoires de l’Etat nation en Amérique latine, Travaux et mémoires de l’IHEAL, Paris, 2001.   

(18) M.A. Bartolomé, Gente de costumbre y gente de razón. Las identidades étnicas en México, Siglo XXI, México, 1997.

(19) Cf. L. Verdesoto Custode, Descentralizar, grados de autonomía para enriquecer la democracía, Ed. Abya Yala, Quito, 2001.      

(20) Pour ce débat au Mexique, on consultera les ouvrages collectifs édités par Garcia Colorado, et M. Bartolomé et A  Barabas, (op. cité).

(21) A noter que les politiques de discriminations positives à l’œuvre dans la région (en matière de santé ou d’éducation par exemple) n’ont pas besoin d’une reconnaissance explicite d’un statut d’autonomie pour s’exercer : elles s’adressent avant tout à des individus ou des familles privilégiés pour leur qualité d’“indigène“.

(22) Le caractère positif et intéressant du cas latinoaméricain, comparé aux orientations prises par les demandes ethniques en d’autres régions du monde, est que ces dernières ne prennent pas le chemin de la violence. Cf. : C. Gros, Políticas de la etnicidad: identidad, estado y modernidad, Instituto Colombiano de Antropología e Historia, Bogotá, 2001.

(23) Cf. par ex. la position de : F. Escalante Gonzalbo, “Notes sur le problème indigène au Mexique”, Cahiers des Amériques latines, n° 23, 1997, pp. 43-60.

(24) Cf. l’analyse qu’en donne Burguete pour le Chiapas : Burguete Cal y Mayor A., “Procesos de autonomías de facto en Chiapas. Nuevas jurisdicciones y gobiernos paralelos en rebeldía”, in S. Mattiace, R. A. Hernandez, J. Rus, (Ed.), Tierra , libertad, autonomía: impactos regionales del zapatismo en Chiapas, CIESAS, IWGIA, 2002.

(25) M.T. Sierra, “Esencialismo y autonomías: paradojas de las reivindicaciones indígenas”, Alteridades, año7, n°14, 1997, pp. 132-143.

(26) J . Marimán, “Cuestión Mapuche, descentralizacón del Estado y autonomía regional”, Caravelle, Cahiers du monde hispanique et lusobrésilien, n° 59, 1992, P. 189-205.

(27) Cf. S. Mattiace, R. A. Hernandez, op. cit