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Colonisation de la Papouasie occidentale par l'Indonésie
Racisme et négation du droit à l'autodétermination
des 1,5 millions autochtones papous
Le GITPA restitue les interventions du Colloque sur la Papouasie occidentale
du Festival de Cinéma de DOUARNENEZ les 29 et 30 août 2014
Le colloque a été animé par Philippe Pataud Célérier (membre du réseau des experts du GITPA)
avec la participation de 4 représentants de la Papouasie occidentale

PPC: journaliste, membre du réseau des experts du GITPA pour Asie Pacifique ; LT : activiste aux Pays-Bas.
BW : chef de la Campagne pour une Papouasie libre [Free West Papua Campaign], réfugié au Royaume-Uni.
WF : réalisateur de film vit à Djakarta. OA : musicien et activiste, réfugié aux Pays-Bas.
Pouvez vous donner quelques informations sur la Papouasie occidentale ?
PPC : La Papouasie occidentale (PO) couvre la partie occidentale de la deuxième plus grande île du monde, la Nouvelle-Guinée; elle borde à l’ouest la Papouasie Nouvelle Guinée (PNG) et comprend les provinces annexées par l'Indonésie. 52 % de ses 2.400.000 habitants sont autochtones et représentent environ 253 différents peuples, le reste étant des immigrants indonésiens ; officiels (arrivés en Papouasie Occidentale par le biais du programme de transfert de populations à grande échelle mené par le gouvernement indonésien (la transmigration) ; ou spontanés (migration économique). La Papouasie occidentale représentant environ 25% des ressources naturelles de l’archipel sur 0,2% des terres émergées)

Deux chiffres sont éloquents quant à la dégradation de la situation pour les papous de la Papouasie occidentale :
- dans les années 60 : 800 000 papous à l'est (la PNG) et 800 000 à l’ouest (la Papouasie occidentale);
- 50 ans plus tard 7,5 millions en PNG et 1,5-2 millions en Papouasie occidentale et 2 millions d’Indonésiens.
Quelles ont été les répercussions de la décolonisation des Indes néerlandaises sur la Papouasie occidentale ?
LT : Je vis au Pays - Bas ou 1000 papous vivent en exil. L’Indonésie est devenue indépendante en 1945 sauf la Papouasie. Les Pays Bas s’étaient engagés à former les futurs cadres d’une Papouasie indépendante et ont donc envoyé en Europe beaucoup de jeunes papous étudier pour préparer les cadres de cette future indépendance. Ce fut le cas de mon père. Les militants papous ont recherché un drapeau (le Morning star) ; un hymne national qui a alors été reconnu le 1er décembre 1961 par les Pays Bas.
Le président Soekarno était contre cette perspective d’indépendance et donc, 2 semaines après la première levée du drapeau Soekarno a lancé un appel auprès des Indonésiens pour « libérer » la Papouasie des « oppresseurs néerlandais » et il a envoyé son armé contre les néerlandais. Au vue des richesses de la région, les USA ont alors décidé d’aider l’Indonésie à s’approprier la Papouasie. Avec cet objectif, ils ont fait asseoir des représentants des Pays-Bas et de l’Indonésie, sans participation de représentants papous, à une table de négociation qui a abouti, le 15 aout 1962, aux « Accords de New York », qui prévoyaient un referendum lors duquel les papous pourront exprimer s’ils veulent l’indépendance ou la rattachement à l’Indonésie.
Pendant quelques mois, l’administration du territoire a été transférée des Pays Bas aux Nations unies l’ONU pendant quelques mois puis a l’Indonésie de 1962 à 1969. Dés le transfert à l’Indonésie des exactions contre les Papous ont commencé. En 1969 : un referendum a été organisé par les autorités indonésienne par sélection de 1025 papous sur les 800 000 papous, qui s’est traduit par un « acte de libre choix » de rattachements à l’Indonésie, vote qui a été reconnu par les Nation Unies le 19/11/1969. En fait les Nations unies ont seulement "pris notes".
Beaucoup de manifestations en Papouasie et à l’extérieur ont fait suite à ce « referendum », ainsi que la création de l’OPM (Mouvement pour la Papouasie libre), et le début de la lutte armée. Depuis brandir le drapeau papou c’est 15 années d ‘emprisonnement.
Pour quelles raisons le Comité national de Papouasie occidentale a appelé au boycott des élections présidentielles du 22 juillet 2014 ?
BW : C’était la 1ère fois qu’un appel au boycott a été émis. Nous luttons pour notre liberté, notre culture, nos droits politiques que l’Indonésie essaie de détruire. Mon peuple vit dans une prison et subit de nombreuses formes de discrimination. La situation actuelle est très tendue. S’il existait un espace démocratique pour nous en Papouasie occidentale, nous pourrions exprimer librement nos opinions politiques. La Papouasie occidentale et ses 250 tribus est occupées par les militaires et les entreprises indonésiennes. De nombreux Papous sont en prison. Les fois précédentes, pendant 50 ans nous avons voté, mais la suite a été l’envoie de militaires.
Et vous monsieur Oridek Ap, musicien qui êtes réfugié aux Pays bas quel est votre témoignage ?
OA: Mon père a été arrêté, emprisonné puis assassiné lorsque j’avais 9 ans par les forces de sécurité indonésienne, son crime : il écrivait et protégeait des chansons traditionnelles papous. Aujourd’hui je suis là en tant qu’homme libre aux Pays –Bas avec deux de mes frères Je ne suis pas le seul qui ait perdu son père jeune et lorsque je chante ses chansons je reste en lien avec mon père. Les assassinats se poursuivent aujourd’hui à un rythme quasi quotidien. Je voudrais parler du génocide qui se passe en PO et de notre résistance Vous pourrez regarder notre site : http://freewestpapua.org/ (lien) En 1977 a Wamana et en 1988 a Biak : il y a eux des exactions. Le gouvernement des Pays - Bas non seulement a vendu notre liberté, mais vends des armes (des navires corvettes) aux Indonésiens .. L’Allemagne vend des tanks. Écrivez à vos parlementaires sur tout cela !
Et vous monsieur Wensislaus Fatubun, réalisateur de film qui vivez toujours a Djakarta quel est également votre témoignage ?
WF: Je vais vous parler de la situation des droits de l’homme dans ma région frontalière entre la Papouasie occidentale et la Papouasie Nouvelle Guinée (PNG).
Dans cette zone à chaque 5 km il y a des postes militaires. On doit y produire une CI et donner un peu d’argent En 2006 j’ai rapporté ce qui se passait et il y avait beaucoup de violence envers les femmes papoues, des viols et non reconnaissance des enfants qui y sont nés.
Des viols suivis de tortures et d’assassinats.
Dans d’autres régions de PO j’ai vu ce même type de violence Les militaires utilisent cette violence pour terroriser les papous et leur interdire de revendiquer leurs droits Ces exactions sont dénoncées dans la Rapport de la Commission nationale contre la violence contre les femmes mais cela continue aujourd’hui.
Ce rapport a été présenté aux Nations Unies il est disponible sur internet en anglais.
Entre 1977 er 1978 il y a des massacres en masse dans les villages de la région de BW.
Il faudrait boycotter des produits indonésiens tels que l’huile de palme, dont la majeure partie viens de PO.
On vole et on déboise les terres des Papous pour faire des plantations d’huile de palme.
L’année dernière en décembre, j’ai vu des policiers arriver dans un village ; avec leurs armes ils ont forcé les personnes à donner leurs terres à une compagnie agro-industrielle.
Quels sont les objectifs de la lutte des papous de Papouasie occidentale ?
BW : Nous luttons pour un nouveau referendum sur l’indépendance du pays.
La plupart des Indonésiens ne comprennent pas pourquoi nous luttons. L’Indonésie dit que nous sommes des primitifs ce qu’ils disaient aussi pour la population du Timor oriental, et que nous serions incapables de gérer un pays indépendant.
Vers quoi va ce pays avec un nouveau referendum ?
Nous sommes capables de gérer un pays indépendant. Nous avons toujours eu des démocraties dans nos sociétés traditionnelles comme au Vanuatu, en PNG, Fidgi sont des démocraties.
On a déjà l’expérience d’un referendum, celui du Timor oriental, les indonésiens qui y ont émigrés après l’indépendance ont votés pour l’indépendance du Timor oriental.
En PO les papous sont maintenant minoritaires, mais les émigrants indonésiens voteront aussi pour l’indépendance de la PO.
Nous luttons aussi pour la démocratie en Indonésie.
Il est important que les indonésiens luttent pour la démocratie en Indonésie.
Le nationalisme n'apporte jamais la démocratie.
Aujourd’hui ce sont toujours les militaires qui gouvernent en Indonésie.
Les indonésiens doivent nous soutenir car cela va aussi les aider dans leur combat. On leur dis: "libérez nous et on pourra être un bon voisin. Dites à vos militaires de libérer notre pays".
C’est le début mais peut être ensuite on va demander aux pays de boycotter les produits indonésiens, comme cela a été le cas avec l’apartheid en Afrique du sud.
Nos étudiants papous trouvent des étudiants javanais qui veulent les aider mais ils sont considérés comme des traites à l’unité de l’Indonésie.
Qu’elle est la position de la PNG vis-à-vis de la lutte des Papous en Papouasie occidentale ?
LT : La PNG est devenue en 1975 indépendante, ils ont eu un processus de National building qui se poursuit.
La même chose aurais dû se produire en Papouasie Occidentale. Mais cela s’est arrêté. La Papouasie Occidentale doit d’abord se libérer par elle même avant d’imaginer autre chose.
Les peuples papous de PNG sont nos frères et sœurs ; mais leur gouvernement est étroitement lié avec l’Australie qui n’est pas favorable à la cause de la Papouasie Occidentale. L’Australie nourrissant des relations économiques étroites avec l’Indonésie.
On essaie d’influencer le peuple de PNG pour qu’il obtienne de son gouvernement un soutien à la PO.
BW : La Papouasie Occidentale, SALOMON, PNG, FIDGI, VANATU et KANAKY : font partie du « Groupe de fer mélanésien » c’est le même peuple issue de colonisation différentes de pays de l’UE: France, Pays-Bas et Grande-Bretagne.
Un des pays qui donne son soutien inconditionnel est le Vanuatu son 1er ministre a parlé de la situation de la Papouasie Occidentale dans un Forum des Nations unies.
L’Indonésie devrait s’inspirer du processus en cours entre les kanak et la France.
L’Indonésie bloque par tous les moyens notre participation au Groupe de fer. Mais un jour on y arrivera et cela nous donnera du poids vis à vis de l’Europe.
Les pays mélanésiens font appel aux anciens colonisateurs pour soutenir cette cause.