Qui sont les peuples autochtones au Gabon?

Les recensements de la population semblent être particulièrement compliqué au Gabon et les chiffres varient en fonction des sources. Selon les derniers chiffres du recensement 2010 on compterait 1 480 000 habitants, dont plus de 600 000 vivant dans la capitale et ses alentours.
Pour une superficie terrestre de 257 667 km2 la densité moyenne est de 4, 6 hab/km2. Si l’on tient compte de la densité de population dans la capitale (1 800 hab/km2) le reste du pays aurait donc une densité de population proche de 1 hab/km2.

Le Gabon est l’un des pays les moins peuplés d’Afrique.

La population est composée d’environ 50 ethnies de culture et de langues différentes, dont les principales sont les Fang (32%), les Mpongwè (15 %), les Mbédé (14 %), les Punu (12 %), les Baréké ou Batéké, les Bakota, les Obamba, etc

Dans tout le Gabon existent également des communautés de chasseurs-cueilleurs (souvent appelées Pygmées) qui comportent de nombreux groupes ethniques; les Baka, Babongo, Bakoya, Baghame, Barimba, Akoula, Akwoa, qui diffèrent par leurs langues, leurs cultures et leurs localisations. Les communautés pygmées se trouvent dans les villes comme dans les zones de forêt. Leurs moyens d’existence et leurs cultures sont inextricablement liés à la forêt qui couvre 85 % du Gabon.

La population est complétée par une proportion importante d’étranger (environ 300 000) dont la plupart proviennent d’Afrique noire (Cameroun, Guinée équatoriale et les pays du Sahel)

Une méconnaissance du chiffre de la population autochtone pygmée

Le dénombrement des communautés pygmées donne des chiffres variables suivant les sources entre 7 000 et 20 000 personnes :

• En 2005, Le Rapport du PSFE Plan stratégique Forêt Environnement/PDPA : Plan de Développement des Peuples Autochtones établi à la demande de la Banque mondiale fait mention d’un chiffre de 7 040 Rapport PDPA.1
• En 2005, sur la base des recherches existantes et du recensement national, l’Association pour le développement de la culture des peuples pygmées du Gabon (ADCPPG), a estimé le total de la population pygmées gabonaise à 20.005 sur une population totale d’environ 1.400.000 personnes (Massandé D.2005). Il n’existe pas de chiffre officiel des populations autochtones du Gabon car le recensement national de 2006 ne les mentionne pas particulièrement. (cf Rapport ADCPPG), c’est le chiffre qui a été repris en 2007 dans le Rapport de la Mission du Groupe de travail delà Commission africaine sur les populations/communautés autochtones, 2007, Visite de recherche et d’information en République du Gabon.2

• En 2009, Le rapport sur l’Analyse de situation sous – régionale sur la problématique des « peuples autochtones » en Afrique centrale, UNICEF WCARO fait mention d’une population autochtone de 4 500 personnes.3

La situation est donc que le Gabon ne dispose pas d’une information fiable sur le volume des populations pygmées sur son territoire. Cela découle à la fois des problèmes liés aux Déclaration d’états civils (Etablissement des Actes de naissance en particulier) et à la façon dont sont conduites les opérations de recensement (voir chapitre : citoyenneté).

Des débats sur la terminologie « pygmées »

Un article récent publié dans le Journal des Africanistes fait le point sur les différentes terminologies employées pour rendre compte de la réalité complexe des populations forestières d’Afrique centrale. Il montre pourquoi la mise en synonymie des termes « Pygmées », « chasseurs-cueilleurs» et « autochtones » conduit à des erreurs qui ne sont sans conséquences politiques aujourd’hui. De cette analyse, nous retiendrons les quelques points suivants :
• Il est d’abord rappelé la phrase catégorique de Serge Bahuchet en 1993 : « En vérité, les Pygmées n’existent pas, les hommes qui existent ont pour noms Baka, BaBongo, BaKola, BaTwa … » ;
• Le mot « Pygmées » disparait des publications, il est remplacé par une terminologie incertaine : « chasseur-cueilleurs », « chasseurs collecteurs », « peuples de la forêt » et depuis peu « autochtones »…
– au Cameroun, « Pygmée » est jugé insultant et empli de préjugés ;
– au Congo, l’usage du mot est interdit par la Loi de 2011 portant promotion et lprotection des droits des populations autochtones ;
• Un tableau sur les principaux noms et synonymes des communautés ethnolinguistiques « pygmées » dans le bassin congolais montre que ces communautés appartiennent majoritairement à des familles linguistiques bantous cf : Tableau 4

Une non reconnaissance du concept de « peuple autochtone » par les autorités.

Les autorités du Gabon rencontrées au cours de la mission ont tous indiqués que le concept de « peuple autochtone » ne pouvait pas s’appliquer au Gabon mais reconnaissent que les populations pygmées sont les premiers habitants du pays. Ils ne sont pas favorables à une politique de discrimination positive vis à vis de ces populations. Ces positions sont les mêmes que celles exprimées lors entretiens conduits au cours de la mission de la CDHP-UA en septembre 2007 cf: Position officielle

1. SCHMIDT- SOLTEAU Kai Dr. , 2005, PSFE : Plan de Développement des Peuples Autochtones.
2. UNION AFRICAINE. Groupe de travail delà Commission africaine sur les populations/communautés autochtones, 2007, Visite de recherche et d’information en République du Gabon.
3. PAULIN Pascale (sous la dir.), 2009, Analyse de situation sous – régionale sur la problématique des « peuples autochtones » en Afrique centrale, UNICEF WCARO.
4. ROBILLARD Marine, BAHUCHET Serge, 2012, Les Pygmées et les autres : terminologie, catégorisation et politique. Journal des Africanistes 82 (1-2), 2012 : 15-51.